The
Grand INTERVIEW :: Frank Rothkamm :: Juillet 2008
Cette
interview par email a été réalisée
afin de préparer l'émission radio "spéciale
Rothkamm" diffusée sur la Radio Rennaise Canal
B, le mercredi 16/07/2008 à 22h00 : Emission
: L'Asile
le plus sûr.
_VS_
1-
D'où venez-vous ? Quelle est votre formation ?
Je
suis né en Allemagne dans la ville de Gütersloh
qui abritait une base de la Royal Air Force. En allant à
l'école primaire, je passais tous les jours à
côté des baraquements militaires et c'est là
que j'ai entendu mes premiers mots en anglais. Mon premier
instrument a été la flûtes à
bec, puis je suis allé dans ces classes de musique
où j'ai appris à lire et à écrire
la musique. Mais je voulais vraiment jouer du piano, donc
quand mes parents ont fini par en acquérir un, j'ai
appris à bloquer la pédale forte et à
frapper autant de notes basses que possible. Ce fut ma première
" synthèse sonore " et l'effet auditif
que ça a eu sur moi a été très
profond. Puis j'ai pris des cours de piano. La première
année, j'ai eu un professeur dans une école
de musique " moderne " où toutes les leçons
se passaient dans une pièce remplie d'orgues électroniques
et de pianos électriques et dans laquelle tout le
monde jouait avec des casques énormes. Le professeur
circulait autour de nous, prêtait l'oreille à
ce que vous jouiez et vous corrigeait. Je n'aimais pas trop
ce dernier, mais bien entendu je me rends compte maintenant
que c'est là que j'ai eu mon premier contact avec
les claviers électriques des années 1970 et
que certaines présélections des orgues étaient
vraiment uniques. Ma famille a déménagé
à cette époque dans la petite ville de Nürtingen
dans le Sud de l'Allemagne et à cause de mon accent
j'étais un peu un étranger. Je restais à
la maison et je commençais à prendre mes dessins
plus au sérieux. Je venais juste de découvrir
la perspective et la manière de créer des
illusions d'optique. A l'âge de 12 ans j'ai commencé
à composer de la musique, qui était écrite
au départ dans un style classique très basique,
tellement basique en fait que je me souviens encore du premier
leitmotiv aujourd'hui ! Après avoir entendu Paul
Hindemith à la radio j'ai fini par abandonner toute
forme de notations traditionnelles et j'ai développé
un système graphique à moi. En 1980 nous avons
déménagé à Moers, une ville
située à l'embouchure du Rhin au nord de Düsseldorf.
J'ai continué l'étude du piano, auquel j'ai
rajouté le violon et l'Harmonielehre (l'étude
de l'harmonie), mais la musique électronique était
devenu mon véritable intérêt. J'ai emprunté
des quantités de livres de la bibliothèque
du coin et à partir de ce que j'ai lu et des images
que j'ai vues, j'ai bricolé je ne sais trop comment
mon propre système de samples à partir d'un
magnétophone à bandes UHER. Pendant les 2
années qui ont suivi, j'ai alors composé ce
qu'on connaît maintenant sous le titre de " Moers
Works ".
2-
Que pensez-vous des musiques électroniques avant-garde
et où vous situez-vous dans cette riche histoire
? Vous sentez-vous une filiation avec les travaux des studios
de la WDR par exemple ?
Très
tôt j'ai été embarrassé par la
dichotomie ou le " conflit " entre les studios
français et allemands aux débuts de la musique
électronique. Tous les livres sur la musique électronique
que j'ai pu lire mettaient systématiquement en opposition
la libre association de la musique concrète avec
le sérialisme strict de l'Elektronische Musik, comme
si elles s'excluaient mutuellement. Il y avait beaucoup
d'idéologie derrière le processus de création
de cette musique faite directement sur bandes, du fait de
la tendance du modernisme de l'après-guerre à
chercher une rupture complète avec le passé
et à pénétrer dans le nouvel âge
atomique. Donc dès le tout début, mon propre
travail a été inspiré par l'histoire
et ses mouvements dialectiques. Je suis particulièrement
fasciné par l'artisanat engagé dans la construction
de ces expérimentations primitives. Chaque son et
chaque effet sonore devait être fabriqué note
par note. Il s'agissait d'un processus de longue haleine.
Donc à partir de 2002-2006 j'ai consciemment réinvesti
cette rupture moderniste à travers mon travail et
j'ai adopté cette méthode anti-économique
dans laquelle l'enregistrement du son véritable prend
une infime partie du temps comparée à l'importance
de la préparation et du montage.
3
- En lisant certaines de vos déclarations, nous nous
demandions si vous oblitériez délibérément
les évolutions récentes de la musique électronique.
Est-ce vrai ?
Oui
c'est vrai, parce il n'existe pas d'" évolution
" en musique. Il existe cependant une illusion dans
la société qui est peut-être liée
aux concepts hégéliens du 19e siècle
de l'Histoire ou de la Manifest Destiny (Manifestation du
Destin), selon laquelle la culture se déplacerait
vers un stade supérieur et qu'il y aurait un progrès
qui se réaliserait. On pense ainsi que le moteur
qui conduit l'esthétique et la culture serait le
même que celui qui conduit l'économie. L'illusion
dominante avance que la musique avant-garde serait liée
à l'histoire de la notation, qu'elle aurait été
monophonique à ses débuts et qu'elle aurait
évolué vers des sons de plus en plus complexes
jusqu'à aboutir aujourd'hui à la sainte trinité
des couacs instrumentaux, des techniques de jeu étendues
et des glitch digitaux. L'illusion dominante en musique
traditionnelle réside dans la restauration constante
du passé, l'obsession de vénérer et
rejouer les canons des chefs d'uvres, ce qui est en
réalité une forme de Pessimisme Culturel,
puisqu'on remplace le futur par le passé. Les pièces
que je produis sont donc délibérément
faites pour révolutionner le temps et les genres
: elles sont poly temporelles, non économiques et
sont situées à l'intérieur ou à
la frontière des catégories ; elles sont situées
à l'intérieur du mouvement dialectique de
l'Histoire. Au fond le but de mon uvre n'est pas seulement
de faire table rase des évolutions récentes,
mais surtout la critique de la " Totalisation "
elle-même. Comme les uvres sont toujours situées
à l'intérieur de la société
réelle, ma production n'est pas de l'art, mais seulement
une commodité qui ne génère pas de
surproduction. Comme Adorno l'a dit : " Quiconque se
soumet à la discipline dialectique doit indiscutablement
payer le tribu amer de la polyvalence qualitative de l'expérience
". Quelle déception ! Mais je pense que de la
même manière que la société doit
arrêter de dépendre d'une seule source d'énergie
qui s'amenuise, l'esthétique et donc la musique devront
faire de même.
4-
Pourquoi un jeune compositeur comme vous choisit-il de travailler
exclusivement sur des ordinateurs vintage et une technologie
dépassée ? Vous arrive-t-il de jouer sur des
ordinateurs portables ?
Je
ne suis malheureusement pas si jeune, à moins que
vous ne considériez 43 comme le nouveau 23 ! Je travaille
sur des ordinateurs vintage parce qu'ils n'ont pas de vraie
valeur marchande dans la société actuelle.
Ils possèdent des convertisseurs Digital-Analogique
uniques, ils sont porteurs d'histoire et faciles à
dégotter dans les boutiques d'occasion et les débarras.
C'est presque comme de l'archéologie : " Voyons
jusqu'où ces petits objets vont m'amener ".
La technologie et l'esthétique sont dépassées
uniquement si elles ne sont plus utiles ou si elles ne sont
plus une praxis. Et oui je me sers bien de laptops, mais
vu que je souffre de troubles nerveux à répétition,
il est plus pratique pour moi d'utiliser un ordinateur de
bureau traditionnel.
5-
Les mathématiques et les algorithmes paraissent être
à la base de vos compositions. Les contraintes prennent-elles
une part essentielle dans votre manière de composer
? S'agit-il d'une sorte d'obsession chez vous ?
Les
limitations sont effectivement fondamentales. Nous aimons
imaginer notre monde comme sans limites et que nous pouvons
devenir ce que nous voulons. Il s'agit bien sûr d'une
illusion collective. Les humains sont définis par
leurs limites de même que le monde et l'univers. En
regardant autour de nous, on peut avancer que ce monde a
été créé par un démiurge
imparfait, donc nous sommes créés à
l'image de cette imperfection et au fond nous sommes des
fragments. Donc ce que moi je propose, c'est une forme de
musique post-humaine, une musique qui connaît les
défauts de fabrication des humains et cherche à
refaçonner fondamentalement notre ADN. Certaines
de mes uvres sont destinées à être
perçus par des êtres humains futurs, parce
que pour la plus grande part j'ai dû affronter d'incroyables
difficultés dans la société humaine
d'aujourd'hui juste pour éditer ou jouer mes uvres
sur scène. Pour les gens ici aux Etats-Unis la validité
du système d'échange de monnaie (et la bourse
en particulier) paraît évidente, donc on peut
voir les mêmes principes à l'uvre dans
ma musique que les modèles mathématiques qui
nous gouvernent et représentent notre économie
ou le mouvement axiomatique des prix des matières
premières. Et une part de ceux-là est complètement
inventée, sans base scientifique admise de quelque
sorte, comme un enfant qui jouerait à faire semblant.
6
- Pouvez-vous expliquer le rôle des algorithmes et
de la symétrie dans votre musique ?
Je
peux seulement dire ceci. En 1986, alors que je travaillais
à la clinique de l'Université à trimbaler
des patients malades, j'en suis venu à l'idée
d'un langage algorithmique qui pourrait être compris
et exécuté à la fois par les machines
et les hommes.
7-
Nous sommes frappés par la profusion d'idées
scientifiques, philosophiques et poétiques sur la
cybernétique dans vos disques ? Le modernisme, le
futurisme, la vitesse et l'accélération sont-ils
juste des thèmes inspirants pour vous ou forment-ils
le noyau de votre travail ?
Comme
forme d'art conceptuel post-moderne, ce qui est vraiment
un qualificatif commode pour le marché moderne, mes
albums ont de multiples facettes. Ils impliquent de l'art
plastique, de la sculpture, de la technique, du texte et
de la musique. Le noyau de cette uvre est façonné
par ma propre vie à l'intérieur de la société
américaine durant ces 2 dernières décennies.
8
- Nous sommes également plutôt impressionnés
par l'importance des décalages spatio-temporels dans
votre travail et dans vos déclarations par exemple
dans le livret de LAX. S'agit-il pour vous d'une forme de
critique des évolutions de la société
moderne ?
La
perception façonne toujours la réalité,
l'idéologie et les idées dominent et infléchissent
la vie des gens. LAX est une réinterprétation
du phénomène Y2K qui a déferlé
sur Los Angeles vers 1998-2000. Ce fut une hallucination
collective et une illusion à grande échelle,
avec le gouvernement américain et les corporations
qui dépensaient réellement des millions pour
résoudre un problème imaginaire. Cela a conduit
au développement de ce que j'ai appelé une
réalité parallèle dans l'essai LAX.
A cette époque j'avais construit un studio avec un
superordinateur (cf photo), pour faire des quantités
de calculs parallèles. Cela incluait de nombreux
Atari ST basés sur des systèmes ADAP, avec
d'énormes disques durs externes, en fait ma version
à moi du superordinateur qui était conçu
à partir de vieux ordinateurs domestiques. Ceux-ci
étaient évidemment protégés
du Y2K, parce que les Atari n'avaient pas d'horloge interne.
Comme vous pouvez le voir au centre de la photo, le iMac
est le seul ordinateur contemporain de cette époque,
parce que je m'en servais uniquement pour gagner de l'agent
dans l'industrie informatique. Mes computations étaient
toutes basées sur le système des distributions
aléatoires uniformes, certaines étaient exécutées
sur un ordinateur analogique qui était construit
à partir de générateurs de fréquences
qui devaient être manipulés à la main.
La machine à computation la plus intense (en langage
IFORMM basé sur du Forth et traduite en Csound) est
en Architecture XFM OR New Encounter et sa partie visible
est construite comme la construction de nature parabolique
que l'on voit sur la pochette du CD LAX. LAX au fond "
transporte aux extrêmes de la culture et la culture
à ses extrêmes " vu qu'il replace les
illusions sociétales au centre des computations basées
sur la loi des grands nombres. Le résultat obtenu
devient une nouvelle réalité pour l'auditeur,
une vision universelle. En 2005 j'ai placé tout cet
équipement historique dans une maison située
sur la propriété d'un ami à moi à
Ramona, une ville proche du désert de Borrego Springs
en Californie. Je l'avais laissé là-bas parce
que j'étais à court d'argent et que j'ai déménagé
à New York. Le 23 octobre 2007 tout a été
détruit par le " Witch Fire ", le grand
incendie de la Californie.
9
- Vos productions s'inscrivent-elles dans une continuité.
Et si oui laquelle ?
Voilà
une très bonne question. Je ne pense pas qu'on puisse
identifier la même personne à travers toutes
mes pièces et cette situation ne va pas s'améliorer
avec le temps. Je suis incapable de m'attacher très
longtemps à un style en particulier ou à une
méthode. J'ai toujours pensé qu'en vieillissant
j'aurais trouvé mon style et ma place dans l'histoire,
mais plus les années passent, plus je vieillis et
j'attends toujours. Je crois à la simultanéité
de tous les styles et c'est dans l'omniprésence de
l'histoire que je me suis dissous. Peut-être que les
32 parties de la trilogie FB01 constituent l'uvre
qui a le plus de cohérence. Elle dure 1 heure 55
minutes et 41 secondes et elle est faite pour être
jouée sur un système de diffusion 3D dans
3 lieux en une même soirée : FB01 avant le
coucher du soleil sur l'eau, FB02 au moment même du
coucher du soleil sur un toit et FB03 après le coucher
du soleil dans une chambre obscure.
10
-
Est-ce que vous utilisez toujours votre système IFORMM
(Intuitive Future Oriented Retrograde Motion Music ) dont
vous vous étiez servi pour la série des FB
?
Non,
le materiel informatique d'origine du système IFORMM
a brûlé lors du " Witch Fire " de
l'an dernier.
11-
Vous vous mettez régulièrement en scène
et offrez différents visages. Quelle est la part
de dérision, de second degré dans ce que vous
faites ? S'agit-il d'une volonté délibérée
de dérouter l'auditeur, de brouiller les pistes ?
En
effet, je me sers de ça pour démonter la prétention,
l'estime de soi sans talent, la langue de bois politique,
l'idolâtrie des gadgets et les subventions des Etats
pour la pollution de l'air. Ce que Marx a fait avec Hegel,
je propose de le faire pour Stockhausen. N'oublions pas
ce qui est écrit dans le Capital : " Le fait
que la dialectique dans les mains de
Stockhausen souffre
de mystification, est loin de l'empêcher d'être
le premier à expliquer, d'une manière ample
et consciente, les formes générales de son
fonctionnement. Avec lui la dialectique apparaît la
tête à l'envers. Vous la remettrez sur ses
pieds si vous découvrez sous l'écorce mystique
la semence rationnelle "
12-
Cherchez-vous à rapprocher le sérialisme de
la culture populaire ? Pouvez-vous nous expliquer votre
concept de " sérialisme de science fiction ".
Pour
comprendre le sérialisme de science-fiction, il est
nécessaire de considérer d'abord avec attention
les 3 principes du supermodernisme : 1. Soyez utopistes
et scientifiques. 2. Saluez les premiers pionniers. 3. Faites
un plein usage de la voie de gauche, de droite et de la
voie fantôme. Dès que ces principes sont pleinement
compris, mettez-vous à l'étude de la science-fiction
et du sérialisme qui sont deux aspects différents
d'une même pièce. a) L'invention d'une science
qui n'existe pas encore amène à l'Utopie et
b) Le Sérialisme Total conduit à tout paramétrer.
La culture Pop d'un autre côté est le meilleur
des mondes possibles à n'importe quel moment. C'est
populaire parce que cela amène des " Wahrnehmungen
" (sensations), soit rythmiques soit mélodiques,
qui sont très agréables à la plupart
des gens. Par conséquent le Sérialisme de
Science Fiction a pour but de créer l'utopie de la
totalité des perceptions, ce qui tient beaucoup de
l'expérience psychédélique.
13
- Ne trouvez-vous pas qu'il y a un aspect librairie musicale
dans vos disques, notamment le dernier Just 3 Organs ?
Librairie
musicale ! Oui complètement. Je suis marié
à une libraire.
14
- Travaillez-vous parfois sur de la musique fonctionnelle,
par exemple pour le cinéma, des films expérimentaux,
pour Hollywood ou pour Star Wars ? Nous avons repéré
dans votre discographie que vous avez fait des remix pour
quelques musiciens très connus. S'agit-il d'une activité
régulière pour vous ?
Non,
aucune activité n'est devenue régulière
ou une carrière pour moi. J'ai fait des boulots pour
des gens célèbres et pour les plus grosses
compagnies américaines. Mais tout ça arrive
juste comme une séquence d'occurrences aléatoires
et mon avenir artistique et financier reste incertain.
15.
Est-ce que vous jouez souvent dans des groupes ou avec d'autres
musiciens comme par le passé avec Elliott Sharp,
Alfred Harth ? Pratiquez-vous régulièrement
l'improvisation ?
Assez
peu souvent, mais en septembre prochain au festival Ystad
en Suède avec Per Svensson nous allons présenter
une performance mixte audio video en duo et avec des invités
surprises.
16-
Votre carrière semble connaître un nouveau
départ depuis 2005. Pouvez-vous nous en dire plus
sur les périodes précédentes dont nous
ignorons tout, notamment l'époque de The Mystery
of the Leaping Fish, Planet Genius, Commercial Reel, Xtasea
?
La
plus grande partie de mon travail expérimental n'avait
pas été édité jusqu'en 2005,
quand j'ai atteint 40 ans. Depuis 6 albums CD (une technologie
d'arrière-garde !) sont sortis et heureusement j'ai
eu beaucoup d'articles dans la presse pour ceux-là.
Toutes mes bandes sons, démos et pubs sont en train
d'être retravaillées en ce moment dans un concept
intitulé " Star Struck ". Le 2 juillet,
mon premier CD extra (avec un petit film et une partition
de 102 pages) doit paraître. Il s'intitulé
" OPUS SPONGEBOBICUM ". Et il y a un article sur
moi dans le numéro de juillet du magazine "
Electronic Musician ".
17
- Est-ce indiscret de vous demandez sur quoi vous travaillez
en ce moment ?
De
nombreux autres albums sont en chantier. J'en suis aussi
à la moitié du mastering d'un autre CD extra
intitulé " Alt " pour l'excellent label
de Paris Baskaru, qui contiendra une série de photos
sur 8 panneaux que je dois encore réaliser. Je dois
donc retourner à New York pour quelques prises de
vues et faire des repérages de lieux.
J'ai déjà trouvé des salles fantastiques
pour jouer LAX et Just 3 Organs et j'attends de voir si
ça va aboutir.
18
- Pour finir, comment définiriez-vous votre musique
à un néophyte en utilisant 3 adjectifs, 3
animaux, 3 objets et 3 personnages historiques ? !
J'espérais
que vous en chargeriez !
(traduction
depuis l'anglais : Philippe)
Where do you
come from and what is your background ?
I
was born in Germany in the town of Gütersloh, where
the British Royal Air Force had a base. On my way to elementary
school I passed by the military housing units every day
and heard my first words in English. My first instrument
was the recorder and I went to these group lessons and learned
how to read and write music, but I really wanted to play
the piano, so when my parents finally acquired one I figured
out how to hold the sustain pedal and hit as many bass notes
as possible. This was my first "synthesis" and
the auditory effect it had on me was very profound. Then
I took piano lessons. For the first year I had a teacher
at a "modern" music school, where the lessons
took place in a room filled with electric organs and electric
pianos and everybody played while wearing a huge pair of
headphones. The teacher would go around and listen in to
what you're playing and correct it. I did not like this
one bit, but of course I now realize that is how I first
got to play on electric keyboard instruments from the 1970s
and some of the organ presets were actually very unique.
My family moved then to the small town of Nürtingen
in Southern Germany and because of my accent I was a bit
of an outsider and stayed home and took my drawings more
seriously. I had just discovered perspective and how you
can create optical illusions. At the age of 12 I started
to compose music, which was first done in a very basic classical
style, so basic in fact I remember the first "leitmotif"
to this day. After hearing Paul Hindemith on the radio I
eventually abandoned all forms of traditional notation and
developed a graphic system of my own. In 1980 we moved to
Moers, a city by the Rhine River north of Düsseldorf.
I continued to study piano, eventually adding the violin
and Harmonielehre (study of harmony), but my real interest
was now in electronic music. I borrowed a lot of books from
my local library and from what I read and saw in the pictures
I somehow built my own "sampling" system around
a UHER reel-to-reel tape machine. I was 16 years old. During
the following 2 years I would then compose what is now known
as 'Moers Works'.
What do you think of avant-garde electronic music and
where do you put yourself in that rich history ? Do you
think there could be a link between your own work and early
electronic experiments like WDR studio era for instance
?
Early
on I was confused about the dichotomy or the "conflict"
between the French and German studios at the dawn of electronic
music. All the books about electronic music that I read
always contrasted the free association of "Musique
Concrete" with the strict serialism of "Elektronische
Musik", as if they are mutually exclusive. There was
a lot of ideology involved with the creation of music made
directly on tape because of the tendency of post-war modernism
to make a complete break with the past and to usher in the
new atomic age. So, right from the start my own work was
infused with history and its dialectical movement. I am
particularly fascinated by the *craft* involved in constructing
these early experiments. It took them many hours to produce
a few seconds of music. Each sound and sound effect had
to be created one note a time. The mechanics were very labor-intensive.
So from 2002-2006 I consciously re-enacted the modernist
break towards my own work and adopted the anti-economical
method, where the recording of the actual sound takes a
tiny fraction of time compared to the enormous task involved
of preparation and editing.
Reading
some of your declarations we wondered if you deliberately
obliterate recent evolutions ofelectronic music. Is this
true ?
That
is true, because there is no such thing as 'evolution' in
music. However there is an illusion in society, perhaps
linked to 19th century concepts of Hegelian History or Manifest
Destiny, that culture is moving to a higher plateau and
that progress is being made. So, the engine that drives
the economy is thought to be the same as that driving aesthetics
and culture. The dominant illusion is that avant-garde music
is the history of notation, that it started monophonic and
evolved into ever more complex sounds resulting in today's
holy trinity of instrumental farts, extended techniques
and laptop errors. The dominant illusion in traditional
music is the constant restoration of the past, the obsession
to worship and re-enact the canon of masterpieces, which
is in actuality a form of Cultural Pessimism, as it replaces
the future with the past. So the works that I release are
deliberately made to revolutionize time and genre: they
are poly-temporal and non-economic and are located in the
interior or at the border between categories; they are located
on the inside of the dialectical movement of history. Basically,
the target of my life's work is not only the obliteration
of recent evolutions, but the critique of Totalization itself.
As the works are always situated within real society, my
output is not art, but simply a non-surplus-generating commodity.
As Adorno put it: "Whoever submits to dialectical discipline,
must unquestionably pay with the bitter sacrifice of the
qualitative polyvalence of experience." That's a bummer.
But I feel that just as society has to break its dependence
on a single source of depleting energy, so aesthetics, and
with it music, will have to do the same.
Why a young composer like you chose to work almost solely
on vintage computers and outdated technology ? Do you sometimes
play on laptops ?
Unfortunately,
I'm not that young unless you consider 43 the new 23. I
work on vintage computers because they have no real exchange
value in today's society, they have unique Digital-to-Analog-Converters,
they are carriers of history and are easy to find in thrift
stores and junk shops. This is almost like archeology: "Let's
see how far this little object will carry me". Technology
and aesthetics are only outdated if they are no longer useful
or are no longer a praxis. And yes, I use laptops, but since
I suffer from Repetitive Strain Injury, it's more comfortable
for me to use a traditional desktop computer.
Mathematics
and algorithms seems to be at the root of your compositions.
Are constraints an essential part of your way of composing
? Is it a kind of obsession for you ?
Yes,
limitations are fundamental. We like to think of our world
as limitless, that resources and the imagination have no
limits; that you can be everything you want to be. This
of course is a collective illusion. Humans are defined by
their limitations as is the world and universe. By looking
around one could even argue that the world must have been
created by an imperfect demiurge, so we are created in the
image of imperfection, we are fragments basically. So what
I propose is a form of Post-human music, a music that knows
about the design failures of humans and seeks to fundamentally
reshape our DNA. Some of my works are aimed at the perception
of future human beings, because for the most part I have
faced incredible difficulty with today's humans just to
get my work published & staged. Most of it remains unpublished
and without a performance venue. People here in the U.S.
take the validity of the monetary exchange system (and the
stock market in particular) as axiomatic, so in the mathematical
models that govern and represent our economy, in the random
movement of stock prices, you see the same principles at
work as in my music. And some of it is really just made
up, with no current scientific basis whatsoever, like a
kid in the land of make-believe.
Could you explain the role of algorithms and symmetry
in yourmusic ?
I
can only say this: In 1986 while working at the University
clinic lugging ill patents around, I came up with an algorithmic
language that can be understood and executed by both machines
and humans.
We've
been astonished by the importance of scientific, philosophical
and poetical thoughts about cybernetics in your records
? Are modernism,futurism, rapidity and speeding up just
inspiring themes for you or do you consider those notions
as the nucleus of your work ?
As
a form of "postmodern conceptual art", but really
only a real operating commodity in today's markets, my albums
have indeed many aspects: visual, sculptural, technical,
textual and there is music involved. The nucleus of the
work is shaped by my life within American society for the
past 2 decades.
We
were also quite impressed by the importance of space and
time discrepancies in your work and your declarations for
instance in LAX's booklet. Is it a kind of criticism of
the evolutions of modern society ?
Perception
always shapes reality, ideology and ideas dominate and bend
people's lives. LAX is a re-enactment of the Y2K phenomena
that swept through Los Angeles from 1998-2000. It was a
collective hallucination and illusion on a grand scale,
with the U.S. government and corporations actually spending
millions of dollars trying to fix an imaginary problem.
It led to the development of what I call a 'parallel reality'
in the LAX essay. At the time I had set up a super-sized
computer music studio, to do lots of parallel computations.
This included multiple customized Atari ST based ADAP systems,
with huge hard-drive cases, you know, my version of a "supercomputer",
which was made from old home computers. These were of course
'Y2K' safe, because the Atari did not have a system clock.
As you can see in the center of the picture, the iMac is
the only contemporary computer for the time, because I only
used it to make money in the Dotcom industry. My computations
all dealt with uniform random distributions, some I executed
on an 'analog computer' which was constructed from sine
wave generators which had to be operated by hand. The most
intense machine computation (done in my Forth based IFORMM
language and rendered in Csound) is in 'XFM OR New Encounter
Architecture', where the dense piece is shaped like the
parabolic theme building you see on the cover of the LAX
CD. LAX basically 'moves to the extremes of culture and
the culture to extremes' as it puts societies' illusions
through computations based on the law of large numbers:
the result is a new reality for the listener, a universal
view. In 2005 I put all of this historic equipment into
a house that was located on the estate of a friend of mine
in Ramona, California, a town close to Borrego-Springs desert.
I put it there because I ran out of money and moved back
to New York. On October 23, 2007 all of it was destroyed
in the California Witch Fire.
Is there a kind of continuity in your releases ? If so,
which is it ?
This
is a very good question. I don't think that anybody could
necessary identify the same person with all of my works
and this situation will not improve as time goes on. I'm
unable to stick to any particular style or method for long.
I always thought that when I got older I would have found
my style and place in history, but the years passed, I got
old and I'm still waiting. I guess in the concurrency of
all styles and the omnipresence of history is where I have
dissolved myself. Perhaps the 32 part FB01 trilogy has the
greatest amount of coherence: It lasts 1 hour 55 minutes
and 41 seconds and is meant to be performed on a 3D sound
system in 3 locations in one evening: FB01 before sunset
on the water, FB02 exactly at sunset on a rooftop, and FB03
after sunset in a camera obscura.
Are you still using the IFORMM system as in the FB series
?
No.
The original hardware-based IFORMM system burned down in
the Witch Fire last year.
How do humour and irony belong to your music ? ! You're
used to present different faces and play different roles.
What's the aim of that ? Is it a deliberate need for you
to throw out listeners and to cloud the issue ?
Indeed, I use them to demonstrate pretentiousness, untalented
self-importance, political correctness, gadget idolization,
and state subsidized air pollution. What Marx did with Hegel,
I propose to do with Stockhausen. Let's never forget what
it is written in Das Kapital: "The mystification which
dialectic suffers in
[Stockhausen's] hands, by no
means prevents him from being the first to present its general
form of working in a comprehensive and conscious manner.
With him it is standing on its head. It must be turned right
side up again, if you would discover the rational kernel
within the mystical shell."
Are you trying to mix serialism with popular culture
? Could you explain to us your concept of sci-fi Serialism
?
To
understand Sci-Fi Serialism it is necessary to contemplate
first on the 3 principles of supermodernism: 1. Be utopian
and scientific 2. Nod to the first pioneers 3. Make full
use of left, right and phantom channel. Once these are fully
comprehended, one may move on to the examination of science
fiction and Serialism, which are different sides of the
same coin: a) The invention of a science that does not yet
exist leads to utopia, and b) Total Serialism leads to the
parameterization of everything. Pop culture, on the other
hand, is the best of all possible worlds at any moment in
time. It is popular because it provides 'Wahrnehmungen'
(sensations), either rhythmic or melodic, that are most
agreeable to most people. Therefore, Sci-Fi Serialism aims
at creating the utopia of the totality of perceptions, very
much akin to the psychedelic experience.
Don't
you think your records have a kind of music library feeling,
your last one Just 3 organs in particular ?
Library Feeling! Yes, indeed. I am married to a librarian.
Do
you sometimes work on functional music, for instance for
movie pictures, experimental
movies, for Hollywood, Stars Wars ? We've noticed in your
discography that you've released remix for some well-known
musicians. Is it a regular activity for you ?
No,
nothing has ever become a regular activity or career for
me. I've done stuff with famous people and for Fortune 500
companies. But, everything appears just as a string of random
occurrences, with my artistic and financial future uncertain.
Do
you often play with bands or others musicians like Elliott
Sharp, Alfred Harth in the past ? Do you frequently practice
improvisation ?
Very
infrequently, but this September at the Ystad festival in
Sweden, and in October at Harvestworks in New York, I, along
with Per Svensson, will put together a dual screen/dual
audio performance with special surprise guests.
Your career appears to know a new takeoff since 2005.
Could you tell us more of earlier periods which are totally
unknown for us, especially the Mystery of the Leaping Fish,
Planet Genius, Commercial Reel, Xtasea periods ? Would it
be too indiscreet to ask you what you are working on at
this very moment ?
My experimental work was all but for the most part unpublished
until 2005, when I was 40 years old. Since then 6 Compact
Discs Albums (an outdated technology!) have been released,
and I have fortunately gotten a lot of press for these.
Many more albums are in the works. All of my soundtracks,
demos and commercials are being reworked right now into
a concept called 'STAR STRUCK'. On July 2nd, my first Enhanced
CD (which includes a short film and 102 page score) will
be released. It is called "OPUS SPONGEBOBICUM".
An article about me will be in the July issue of 'Electronic
Musician' magazine. I'm also in middle of mastering an Enhanced
CD called 'ALT' for the great Baskaru label in Paris, which
will include a 8 panel photo work, which I still have to
shoot. So, I'll go back to New York for some filming and
location scouting. I have already found wonderful performance
locations for LAX and JUST 3 ORGANS and will see how far
I get.
At
last how could you describe your music to a neophyte using
3 adjectives, 3 animals, 3 objects and 3 great figures ?
!
I
was hoping you would do that.