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Edgard Varèse et Léon Theremin
VARESE
: Libérer les sons
De 1914à 1927, Edgar Varèse
(1883-1965) émigre à New-York où
il demeure très fortement marqué par les
expériences et les théories des futuristes
et notamment celles de Luigi Russolo et Ferruccio Busoni.
Varèse souhaite faire de la musique avec des sons
et non plus avec des notes,
tous les univers sonores ont le droit de cité dans
sa musique : les bruits et les sons "purs".
Il compose "Amériques"
(1918-21), une pièce écrite pour des
instruments traditionnels avec un goût très
prononcé pour les "arrêts subits",
les "intensités brusquement coupées",
les percussions, la vitesse, la vitalité, où
il intègre même les hurlements de la sirène
des pompiers de New York.
Cet aspect de son uvre se renforce en 1931 avec
"Ionisations" : première uvre
occidentale pour percussion seule, écrite pour
trente-sept instruments, cette fois-ci l'intrumentarium
inclut : sirène, enclume et un tambour à
corde pour simuler le rugissement du lion.
A partir de 1936, il commence à s'intéresser
à la manipulation des disques. Dès 1917,
Varèse prône la fabrication de nouveaux appareils
générateurs de sons.
"Les avantages que je vois sont ceux-ci : une
machine semblable nous libèrerait du système
arbitraire et paralysant de l'octave, elle permettrait
l'obtention d'un nombre illimité de fréquences,
la subdivision de l'octave, et, par conséquence,
la formation de toute gamme désirée, une
étendue insoupçonnée de registres,
de nouvelles splendeurs harmoniques que l'usage de combinaisons
sub-harmoniques rendrait possibles, des sons combinés,
des différenciations de timbres, des intensités
inhabituelles au-delà de tout ce que peuvent accomplir
nos orchestres, une projection du son dans l'espace par
son émission de l'une ou l'autre partie d'une salle
de concert, selon les besoins de l'uvre, des rythmes
qui s'entrecroisent indépendamment les uns des
autres
cette invention pourrait jouer toutes les
notes voulues (
) "
En 1934, il écrit "Equatorial",
une pièce "électronique" pour
le Theremin.
Pour Varèse, la vitesse
et la synthèse sont les traits caractéristiques
de notre époque : nous avons besoin d'instruments
nouveaux pour nous aider à faire évoluer
la musique, il faut ouvrir plus amplement la musique à
toutes les myriades de sons, le bruit est un son en gestation.
Varèse, se démarque cependant des bruitistes
futuristes à qui il reproche en 1917 de n'avoir
pas su aborder avec sérieux les nouveaux mondes
sonores et d'en être restés au stade de l'anecdote
(revue "391" de Picabia en 1917). Pour lui,
les instruments à bruits de Russolo ne produisaient
qu' "une matière généralement
d'une indocilité terrifiante", la critique
est acerbe !
Varèse doit attendre la fin de sa vie pour recourir
aux techniques de studio, il compose "Poème
électronique" et "Déserts"
(1954-61) où il juxtapose un orchestre avec
des sons enregistrés sur bande magnétique.
L'uvre, empreinte de mélancolie est présentée
pour la première fois à Paris, le 2 décembre
1954. Les recherches sur la synthèse sonore par
ordinateur, sont pour lui comme un autre aboutissement,
il soutient d'ailleurs les premières expérience
de Max Mathews, le père de la Computer
Music.
THEREMIN et l'antenne chantante
En
1920, Lev Sergeyevich Termen (1896-1993), étudiant
physicien moscovite, construit le Thereminvox appelé
aussi : Termenvox, Antenne Chantante ou encore
Aetherphone(1) composé de deux tiges, l'une
se prolonge verticalement à partir du dessus de
la base de l'instrument, l'autre se projette horizontalement
sur le côté, c'est le premier instrument
électronique aisément transportable. Basé
sur le principe des champs magnétiques de l'audion
piano, la hauteur de la note est fonction de l'éloignement
de la main droite par rapport à la première
antenne et l'amplitude est contrôlée par
la distance séparant la main gauche de l'autre
antenne. Son fondement est élémentaire :
deux oscillateurs délivrent des hautes fréquences,
trop élevées pour être audibles, dont
l'une est constante et l'autre variable. L'interférence
entre les deux fréquences produit toute une gamme
de sons perceptibles.
Cet instrument est le perfectionnement par Léon
Thérémin d'une invention de Lee De Forest
datant de 1915. Dans les années 20, le gouvernement
russe fait des efforts importants afin de développer
l'électricité dans l'ensemble de la Russie,
l'instrument de Léon Theremin attire donc tout
naturellement l'attention des autorités. Après
une présentation de son instrument, appelé
d'abord Aetherophone devant un groupe de scientifiques
soviétiques à Moscou en 1921, Theremin est
invité au Kremlin, dans le bureau de Lénine
pour une démonstration, il joue "l'Alouette"
de Mikhaïl Ivanovitch Glinka (1804-1857).
Lors de ce premier contact, Lénine incite Léon
Theremin à faire des démonstrations de son
instrument dans l'ensemble de la Russie.
De 1927 à 1931, il reçoit un appui pour
une tournée de concerts dans l'ensemble de l'Europe,
il arrive même à New-York où il séjourne
pendant dix années. En 1927, il rencontre la violoniste
professionnelle Clara Rockmore, qui deviendra la
plus connue des interprètes du Theremin (parmi
les autres interprètes : Lydia Kavina, Lucie Rosen,
Dr. Sammuel J. Hoffman et Youssef Yancy). L'appareil est
produit en série et commercialisé par la
compagnie RCA (Radio Corporation of America ) aux Etats-Unis
dès 1929, mais la fabrication sera rapidement stoppée
(au bout de 200 unités). Afin d'en assurer la promotion,
un morceau est même commandé au compositeur
russe Joseph Schillinger : "Airphonic Suite
for RCA Theremin and Orchestra". La pratique
de l'instrument
n'est pas si aisée, malgré ce qu'en dit
la publicité de l'époque : "Si vous
savez siffler, vous saurez jouer du Thereminvox".
Le Theremin est employé dans la conception de bandes
sons et d'effets sonores dans la plupart des films de
science-fictionet des thrillers psychologiques des années
40 et 50 (2).
Au début des années 60, il est transistorisé
et vendu en kit par un jeune électronicien plein
de promesses un certain : Robert Moog (1934-2005).
En 1932, Léon Thérémin collabore
avec la réalisatrice, pionnière de l'avant-garde
cinématographique américaine : Mary Ellen
Bute. Pour la petite histoire, Léon Theremin
est emprisonné pendant plusieurs années
dans un camp dès son retour en Russie en 1938.
De 1942 à 1967, il devient espion pour le compte
du KGB.
(1)
"Lev theremin baptise son invention "aetherophone"
pour distinguer l'instrument de ceux produisant des sons
par contact direct ou par le principe du clavier - Albert
Glinsky dans sa biographie "Theremin. Ether Music
ans Espionage" Urbana & Chicago, University of
Illinois Press, 2000.
(2) Spellbound (1945), The Lost Week-end (1945), It Came
from Outher Space (1953), The Day the Earth Stood Still
(1953)
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s u g g e s t i o n s
d ' é c o u t e
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> Edgard Varèse
Amériques, 1918-22
Hyperprism, 1923
intégrales, 1926
Ionisation, 1931
Equatorial, 1934
Déserts, 1949-54
Poème Électronique,
1958
> Clara
Rockmore
vocalise (de Rachmaninov)
Valse Sentimentale (de
Tchaikovsky
> Bernard Herrmann
B.O. "The Day the Earth Stood Still" ,1953
> Joseph Schillinger
Airphonic Suite for RCA Theremin and Orchestra, 1929
> Dr. Samuel J. Hoffman
Music Out of the Moon, 1947
Perfume Set to Music, 1948
Music for Peace of Mind, 1950
> Beach Boys
Good Vibrations, 1966
> Captain Beefheart
Electricity, 1967
Autumn Child, 1967
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