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• Stockhausen et le studio de musique électronique de la WDR à Cologne

En Allemagne, le studio de musique électronique de Cologne nait officiellement le 18 octobre 1951, le jour ou Herbert Eimert, Robert Beyer et Werner Meyer-Eppler diffusent sur les ondes de la NWDR (Nordwestdeutscher Rundfunk) une émission intitulée "Die Klangwelt der elektronische Musik" (Le monde sonore de la muHerbert Eimert et l'ingénieur du son Leopold von Knobelsdorff au studio de la Westdeutscher Rundfunk de Colognesique électronique) : une série d'expérimentations sonores effectuées grâce au Melochord d'Harald Bode et à un magnétophone AEG.

Au départ, les activités du studio se limitent (principalement sous l'impulsion d' Herbert Eimert, qui dirige seul le studio de 1951 à 1953) aux sources sonores électroniques, en relation avec une conception formaliste, issue de l'école sérielle. En 1953, Karlheinz Stockhausen revient à Cologne après avoir notamment travaillé dans le studio de musique concrète de la Radio-Télévision française sous la direction de Pierre Schaeffer. Il travaille alors dans ce studio nouvellement établi à la radio ouest-allemande et le 18 octobre 1953, le premier concert de musique électronique est donné à la WDR (Westdeutscher Rundfunk) avec des œuvres de Eimert et Beyer, ainsi que deux premières études électroniques de Stockhausen : Study I et Study II.

La philosophie initiale du studio de la Westdeutscher Rundfunck de Cologne était très différente de celle de Paris. Contrairement à la musique concrète, qui n'utilise que des sons captés par micro, la musique électronique utilise comme matériau de base des sons artificiels produits uniquement par des générateurs de fréquences électroniques : cette approche s'appelle l'Elektronische Musik. Les premiers disques de musique électronique sortent en 1954 chez Deutsche Grammophon. Stockhausen, insatisfait, décide de briser les barrières entre l'instrumentation conventionnelle et les sons électroniques.

Stockhausen dans les studios de la WDR en 1967En 1955, il ouvre la voie à l'utilisation de l'espace acoustique dans son œuvre "Guppen", composée pour trois orchestres placés dans différentes parties d'un auditorium. Il reprendra cette idée dans le domaine électronique avec "Gesang der Jünglinge" (Chant des adolescents) en 1956, conçu pour plusieurs séries de hauts-parleurs. Stockhausen y mélange, dans un même continuum, la voix de jeune garçon (une source concrète : la voix d'un jeune garçon récitant une portion de "livre de Daniel" - Cantique des jeunes gens dans la fournaise) et des sons électroniques : c'est l'une des œuvres fondatrices de la musique électroacoustique et de la spatialisation du son (Stockhausen y expérimente des mouvements de rotation entre cinq hauts-parleurs).

En 1958, il compose "Kontakte" (première oeuvre "mixte" pour instruments et électronique spatialisée) dans lequel les bruits suggèrent des sonorités de percussion et de piano. Lors d'un voyage au Japon en 1966, il compose "Telemusik" avec des bruits enregistrés en Espagne, Viêt-Nam, Bali, Sub-Sahara, Japon et Hongrie : il module toutes ces sources sonores de telle manière que les bruits soient méconnaissables, ils apparaissent furtivement et agissent les uns sur les autres par des moyens électroniques.

générateur d'ondes sinusoïdalesEn 1967, il compose "Hymnen" (1) , dans lequel il traite électroniquement une quarantaine d'hymnes nationaux du monde entier. D'autres œuvres essentielles dans l'histoire de la musique électronique sortent des studios de la WDR comme "Artikulation" de Ligeti ou "Epitaph für Aikichi Kuboyama" de Eimert. Parmi les artistes importants ayant fréquenté les studios de la WDR : Gottfried Michael Koening, Mauricio Kagel, Peter Eotvös, Henri Pousseur (en 1954), Marco Stroppa, Bruno Maderna (Musica suedue Dimensioni), Ernst Krenek, Jean-Claude Eloy, York Höller, Gotfried-Michael Kœnig (dès 1954), Leopold von Knobelsdorf, Konrad Bœhmer (fondateur des studios Steim à Amsterdam en 1969), Paul Gredinger, Karel Goeyvaerts, Bengt Hambraes, Franco Evangelisti, Giselher Kiebe, Herbert Brün, György Ligeti (juxtaposition de lignes mélodiques indépendantes dans "Atmosphères" en 1961), Luciano Berio, Luc Ferrari et Roger Smalley...

Gottfried Michael Koening aura une influence prépondérante sur les compositions de Stockhausen. Suite à des rapports conflictuels entre les deux presonnages, Gottfried Michael Koening partira fonder dans les années 60, l'Institut de Sonologie d'Utrecht. Selon Konrad Boehmer (qui quittera également Stockhausen pour rejoindre Koening), c'est l'esprit même du studio de Cologne qui est transféré à Utrecht !


L'école "concrète" de Paris se caractérise par une démarche expérimentale, l'école "électronique" de Cologne par une rigueur structurelle. D'abord rivales, on assiste progressivement à une fusion relative des deux approches vers le milieu des années 50, avec des œuvres comme le Voile d'Orphée de Pierre Henry, le Gesang den Jünglinge de Stockhausen, la Procession de Vergès et le Poème électronique de Varèse où sons concrets et sons électroniques sont mélangés. C'est à compter de cette période que l'on commence à parler de musique électroacoustique (association de sons enregistrés avec des micros et de sons électroniques).





(1) cette oeuvre est d'une importance capitale pour l'émergence d'une nouvelle scène musicale en Allemagne, vers la fin des années 60. Les groupes de Krautrock, tels que Faust, Kraftwerk, Tangerine Dream ou encore Kluster sont les premiers à utiliser des sources électroniques et électroacoustiques dans leurs compositions

 

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  s u g g e s t i o n s
  d ' é c o u t e



> Karlheinz Stockhausen
L'Etude aux 1000 collants, 1952
Epitaph für Aikichi Kuboyama, 1962
Study II, 1954
Gesang der Jünglinge, 1955-56
Gruppen, 1955
Kontakte, 1958-60
Mikrophonie 1, 1964
Telemusik, 1966
Momente, 1962-64
Spirale, 1968
Hymnen,
1968
Pole, 1969-70
Mantra, 1970

> Herbert Heimert
Klang im unbegrenzten Raum, 1952
Klangstudie II, 1952

Glockenspiel, 1953
Etüden für Tonegemische, 1954
Selektion I, 1959-60
Epitaph für Aikichi Kuboyama, 1966

> Ernst Krenek
Spiritus Intelligentiae Sanctus, 1955

> György Ligeti
Glissandi, 1957
Artikulation, 1958
Pièce Electronique n°3, 1958
Atmosphères, 1961
Lux Aeterna, 1967

> Mauricio Kagel

Transicion I, 1958
Transicion II, 1959

> Herbert Brün
Anepigraphe, 1957
Futility, 1964

> Franco Evangelisti
Incontri Di Fasce Sonore, 1957
Spazio 5, 1961

> Gottfried Michael Koening
Klangfiguren II, 1955-56

Funktion Grau, 1969

> Karel Goeyvaerts

Komposition Nr. 5, 1953
Komposition Nr. 7, 1954

> Paul Gredinger
Formanten I, 1954
Formanten II, 1954

> Henri Pousseur

Seismogrammes, 1954
Scambi, 1957

> Giselher Kiebe
Interferenzen, 1955

> Bengt Hambraeus
Doppelrohr II, 1955

 

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